mardi 5 septembre 2006

From Prishtinë

Pour faire plaisir aux Kosovars, il ne faut pas prononcer Kosovo, mais Kosova. La Priština serbe s'écrit désormais Prishtinë en albanais. Dans les deux cas, la prononciation ne change pas : Prishtina. En France, on dirait plutôt : Pristine.
Ici, ce sont les églises qui ont été rasées, et la reconstruction de l'église orthodoxe qui a posé problème : sa carcasse en brique et ses dômes inachevés sont abandonnés au cœur de la ville, au milieu d'un terrain envahi par les herbes ; à quelques mètres, se dresse la bibliothèque universitaire, petit cauchemar esthétique qui ne me donne aucune envie de lire.
Ici, à défaut de voiles, les mosquées et les décolletés pullulent. On vend des drapeaux américains plutôt que de les brûler. A l'entrée de la ville, la Bil Klinton avenue rejoint Tirana road, puis Nëna Terezë boulevard (ie, mère Teresa, ou encore, Agnes Gonxha Bojaxhiu, albanaise née à Skopje). Aujourd'hui, un kosovar d'une quarantaine d'année a pourtant déploré, devant moi, l'émergence de jeunes barbus. Moi, je n'en ai pas vu un seul.
Encore plus qu'en Republika Srpska, où le drapeau serbe remplace le bosniaque, les kosovars n'exhibent que le drapeau albanais, rouge, frappé d'un aigle noir bicéphale.
Voici le drapeau serbe : assez curieusement, on y retrouve aussi un aigle bicéphale, mais blanc, et coiffé d'un diadème.
Ici, les moins de 20 ans ne parlent plus un mot de serbe. A partir de la rentrée, ils apprendront l'anglais en même temps que l'albanais, même si le serbe reste aussi une des langues officielles. Mais si je me retiens de dire "voda" pour demander de l'eau, et "hvala" pour remercier, j'utilise encore le mot "çorbë" avec beaucoup de satisfaction (ie, soupe, tchorba serbe ou chorba libanaise).
L'euro est la monnaie officielle. L'UNMIK (
United Nations Interim Administration Mission in Kosovo) semble faire un excellent travail de construction administrative. Je me demande si, avec tout ça, et après l'indépendance du Monténégro, il y en a qui pensent encore que le Kosovo restera une province serbe. Sur les murs de la ville, un peu partout, on peut lire :
"JO NEGOCIATA! VETË VENDOSJE!".
Nul besoin d'être expert en albanais pour comprendre. Je me suis toutefois assurée que "jo" (yo) signifie bien "non".
Ici, les gens sont comme là-bas : ils utilisent souvent des expressions comme avant la guerre ou après la guerre. En entretien, je tombe parfois sur des commentaires assez étonnants, du type : "Je travaille ici depuis 7 ans. Avant la guerre, j'avais une petite entreprise. Après la guerre, j'ai reconstruit ma maison qui avait brûlé. Ensuite, j'ai cherché un emploi". Ou encore : "Je travaille là depuis 3 ans, après avoir travaillé pour diverses ONG. Je préfère ne pas parler d'avant la guerre".
Il y a aussi d'autres phrases surprenantes, comme : "Nos activités visent également les minorités du Kosovo, comme les Serbes, les Roms, les Ashkaelis, les Goranis, ou les Musulmans". J’ai cru comprendre que Musulmans fait référence aux Egyptiens.
Moi, j'avais bien aimé la tranquillité de Banja Luka, le Bcharré bosniaque. Bcharré, bastion des plus purs maronites du Liban, ne s'explique pas : ses habitants l'ont dans le sang, les autres se moquent un peu de leur folie et la craignent à la fois ; wikipédia m'apprend que le village est candidat aux J.O. d'hiver de 2018.
Mais enfin, si j'ai quitté avec regret la délicieuse odeur de linge propre de ma chambre à l'hôtel Firenza, je me retrouve dans un Iliria un peu décrépi, dont la désuétude culmine dans le gazon vert qui tapisse les parois de l'ascenseur, et qui me fait systématiquement rigoler.
Prishtinë n'a rien à voir avec Banja Luka. Beaucoup plus avec Tripoli (Liban), en plus dégradé, moins peuplé, et sans les vieux souks. Une ville plutôt laide de prime abord, en dépit de ses toits rouges, avec quelques immeubles dans le pur esprit soviétique, et beaucoup d'autres constructions plus récentes et totalement anarchiques, ne relevant d'aucun style architectural particulier, parfois en verre, mais le plus souvent en brique. Des constructions du XXIe siècle, comme on en voit par milliers au Liban, et qui ne ressemblent à rien.
Pourtant, la nuit, dans les nouveaux restaurants des vieilles rues de Prishtinë, on pourrait se croire à Beyrouth : certaines routes sont défoncées, d'autres pas ; certains trottoirs sont envahis par les voitures, et d'autres pas ; certains lieux sont ultra branchés, et d'autres totalement ringards. Je me demande si les relations entre passants obéissent aussi à des règles sociales implicites que le touriste de passage, comme moi, ne peut pas soupçonner.
J'ai parfois l'impression d'être dans le Beyrouth des années 75-80, celui-là que je ne reconnais jamais dans les films ou les vieilles photos. Dans les magasins d'ici, ces mini-market un peu sombres où l'on pourrait douter de la propreté et de la fraîcheur des produits, ancêtres à la fois du supermarché et de "l'arabe du coin", j'ai retrouvé la même odeur qu'à Beyrouth. Une odeur, c'est très difficile à décrire : un mélange de savon et de chocolat, de fruits et de Babol Gum, d’humidité, d'épices et de centaines d'autres articles odorants les plus divers, entassés dans un maximum de 30 m². Cette saturation olfactive me transporte à travers le temps et l’espace dans les magasins de mon enfance, ceux-là mêmes qui, à Gemmayzé, cèdent progressivement la place à des restaurants comme Gauche caviar. A Beyrouth, l'odeur de ces échoppes se fait de plus en plus rare depuis l'ouverture des Spinneys, Monoprix et autres Casino, tous lumineux, ultra-spacieux et bien ordonnés. Mais de ces échoppes-capharnaüm, je garde un souvenir si précis, que je suis troublée de le retrouver par inadvertance, ici. Je suis troublée de comprendre de façon si intime ce qu'un monde "à deux vitesses" signifie.
Entre le sit-in de mes députés au Parlement de la place de l'Etoile, et le débat des représentants de mon autre pays au sujet de la rentrée Ambition ou Réussite, j'ai retenu que le Colonel Samir Shehade, chef des services de renseignement des FSI (Forces de Sécurité Interne, au Liban) a été blessé dans un attentat à la voiture piégée à Rmaileh, près de Saïda (Sidon).
Il participe à l'enquête sur le meurtre de Hariri. Le prochain rapport de Serge Brammertz est prévu pour le 15 septembre. Dans mon pays, les événements s'additionnent sans jamais s'annuler. Chercher à démêler l'écheveau des responsabilités y est toujours un exercice complexe et périlleux.
Je suis assise dans un café, le Stripdepo : wi-fi gratuit, illy à volonté, style Art Déco, grands fauteuils, et tables qui feraient pâlir de jalousie les revendeurs des puces de St Ouen ; Corto Maltese, l'air insolent et nonchalant, me fixe depuis le mur ; et sur les étagères, on peut trouver, en libre service, Alan Moore en anglais, Largo Winch en français, et Alan Ford, Dylan Dog et Martin Mystère imprimés avant la guerre, tantôt à Zagreb, tantôt à Split et tantôt à Podgorica. A ma gauche, un jeune kosovar avec un beau Google sur son T-shirt, vient de s'exprimer. Il a dit, en anglais : "Terrorism sucks".
En face de moi, une blonde en T-shirt noir raconte :
"I was caught in Beirut this summer".
Je tends l'oreille. J'aimerais oublier, mais où que je sois, Beyrouth me rattrape. Elle ne me quitte plus jamais.
Demain, je pars pour Mitrovicë, ville située dans l'enclave serbe, au nord du Kosovo, et qui avait connu "un regain de tension communautaire" en 2004. Je vais franchir la rivière pour attester des activités serbes de mon client kosovar. Nous aurons une voiture de l'UNHCR. Il y a peu, ce trajet aurait été impossible.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Nad tu depasse tout tu es excellente je c'enorme ce que tu ecris c'enorme ce que tu vis...

Anonyme a dit…

Je voyage avec vous, continuez..quel plaisir d'imaginer les endroits que vous decrivez si bien

Anonyme a dit…

Nadine,

Il faudrait que tu fasses le tour du monde avec ton blog!!!
Continue à écrire, tes messages viennent donner vie à mon écran!!

ThV

Anonyme a dit…

Je savais pas que t'aimais la babol gum ! Anne So

Anonyme a dit…

c koi c connerie tu connai rien sur le kosovo pi encore moins sur prishtina et sa rien avoir avec le liban
faut areter de regader les film

moi habite au kosovo et c pas comme tu di alor essaiy pa de nous rabaissé batar DARDANIA

G.K a dit…

c'est tellement n'importe quoi ce qui est écrit ! tu mélanges tout c'est imcroyable!Style j'suis un grand artiste, un super écrivain t'essaie de nous décrire un endroit que tu crois connaître parce que t'as passé quelques jours là-bas!Et tu te permet de critiquer avec tes "super"phrases, tes métaphores et tes comparaisons qui pour moi ne sont pas du tout appropiées! Je déteste du début à la fin. En te lisant je n'apprend rien du tout sur le kosovo!Tes longues "belles" phrases sont inintéressantes et tu essaie juste de montrer aux gens qui te lisent que toi aussi tu peux écrire, c'est tout ce qui t'intéresse tu t'en fiche au fond tu pays que tu essaie de décrire! J'ai jamais lu quelque chose d'aussi mauvais et pourtant j'en visite des blogs!
Dernier chose arrête d'essayer d'impressionner les gens avec ton écriture et concentre toi plus sur ton sujet.
Merci.