W²
Beyrouth est en feu. J'ai remarqué ce soir que la nuit n'est plus noire : elle reste désormais orangée à l'horizon. Une odeur de brûlé stagne dans l'air chaud et humide de l'été. Je ne peux pas m'empêcher de me demander si l'odeur des charniers palestiniens dont on m'a tant parlé était semblablement persistante.
Les bombardements continuent. Je viens de réaliser que si chaque explosion est suivie d'une épaisse fumée noire, c'est en raison de l'utilisation de bombes phosphoriques. De mémoire, les bombes de la guerre (celle d'avant) explosaient sans feu d'artifice. Faire plus que mentionner ici que ces armes sont interdites depuis 1983 par une Convention au nom complexe serait inutile : croire que l'on peut séparer la guerre de l'abomination relève soit de l'illusion, soit du mensonge.
Le "périmètre de sécurité", zone délimitée par le Hezb à Dahyé, et interdite même à l'armée libanaise (une de ces innombrables zones de non-droit que la communauté internationale voudrait nous voir maîtriser par simple décret), ressemble désormais à Ground Zero.
Des positions de l'armée à Kfarchima viennent d'être attaquées. Le Hezbollah a touché un hôpital en Israël : drôle d'idée...
Le début de la nuit était pourtant calme sur Beyrouth. Il y a deux heures, un commentateur de CNN regardait les étoiles de Haifa et désignait le ciel en disant : "Les avions que l'on entend se dirigent vers le nord. Ils seront sans doute bientôt au Liban". Depuis une heure, les déflagrations ont repris. Je n'ai même plus besoin de regarder les infos pour savoir quand Dahyé est touchée. La première explosion me fait encore sursauter. Les autres me laissent impassible devant mes écrans (PC et télé). Le ventilateur de mon ordinateur se fait l'écho des avions. Mes cours de physique me reviennent en mémoire, et je sais qu'au moment où j'entends une déflagration, elle a déjà eu le temps d'annihiler un bâtiment : les quelques secondes qui séparent le son de la lumière sont aussi celles qui séparent ma vie de la mort de l'un de mes concitoyens. Ne pas avoir peur, dans ces conditions, relève presque de la folie.
Aurons-nous encore de l'électricité au réveil ?
J'ai retrouvé sur le site de CNN la phrase en v.o. de W : "See the irony is what they need to do is get Syria to get Hezbollah to stop doing this shit and it's over". Enoooorme !
1 commentaire:
J'ais l'impression de revivre Beyrouth et l'angoisse de la guerre en te lisant.
C'est fou je suis si loin, mais j'ais l'impression de vivre mentalement les evenements au Liban, c'est comme si un passe que j'ais tellement essayer d'oublier reviens me hanter.
Je me joins aux autres bloggers. Keep writing and be safe.
Marwan-
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