Envies d'ailleurs
Ce soir, je ne sais pas quoi dire.
Voilà 48 heures que j'erre dans les rues de mon quartier latin, sans envies et comme absente de ma propre vie, les pieds ici, mais la tête ailleurs.
Exit le carnet de notes à portée de main, et le crayon qui gratte de 20h à 22h (heure de Beyrouth) : les images d'aujourd'hui ressemblaient à celles d'hier, et probablement à celles de demain. Au Liban, comme en Israël, mais pas dans les mêmes conditions, les déplacés rentrent chez eux. Le Sayyed, comme d'habitude, tient promesse : tracteurs et volontaires sont déjà à l'oeuvre. Partout, de nouveaux cadavres, des bombes qui n'ont pas explosé, des livres et des chaussures abandonnés. Et du gris, à perte de vue. Hormis sur ces sentiers de terre rouge par lesquels les soldats de Tsahal sont heureux de se retirer.
Le discours de Bachar el Assad de ce matin a achevé de me dégoûter : mise en scène jusqu'au bout, récupérations et amalgames étaient au rendez-vous. J'ai noirci deux pages entières, mais, je ne pense à présent qu'aux syriens qui ont eu le courage de s'opposer, ces derniers mois, au régime de leur pays : que vont-ils devenir aujourd'hui que ce dernier opère un retour en force ?
A l'automne 2005, tous les espoirs me semblaient encore permis.
A l'automne 2006, je me demande si le pire n'est pas encore à venir.
Puis je me réponds que non. Que rien n'a changé. Que nous ne voulons pas de guerre civile, et que non, nous ne la ferons pas. Qu'à ceux qui me demandent de refuser l'Etat dans l'Etat, je réponds que je le refuse. Mais encore ? Qu'y puis-je réellement ? Aurais-je pu proposer, dès hier, une aide réelle aux réfugiés libanais ? Pourrais-je convaincre ceux qui se font aider par le Sayyed de ne pas voter pour le Hezb aux prochaines élections ? Pourrais-je, demain, me promener librement dans le "périmètre de sécurité" qui n'existe plus ? Et si non, souhaiterais-je pour autant que les soldats de l'armée libanaise entrent en conflit direct avec une guérilla où ils peuvent avoir un frère, un cousin ou un voisin ?
Ce soir, il n'y a pas de réponse facile, ni de solution satisfaisante : les problèmes me paraissent si complexes que seuls le temps, le dialogue et des hommes de courage semblent pouvoir y remédier.
De tout ce que Assad Jr. a dit, je n'ai trouvé que ces mots de vrai : "C'est maintenant que la vraie bataille commence". Oui, c'est maintenant qu'il va falloir s'acharner, à tous les instants, à vouloir la liberté de la presse, le maintien de l'accessibilité des dot.il, le retour de Rabbi Jacob dans les rayons du Virgin, l'ADSL à la maison, la baisse des tarifs des téléphones portables, la préservation des vieilles maisons de Beyrouth, l'accessibilité gratuite du bord de mer, l'éducation, les soins et la justice pour tous. A vouloir, en bref, que la vie reprenne le dessus. Et à militer pour la tolérance et le bon sens.
Ce soir, j'ai encore envie de dormir dans mon (autre) lit.
1 commentaire:
Ce soir almanar a diffuse une scene plutot insolite de la reception de Tsahal par l'armee libanaise a Marjayoun...
On leur a offert du the (khod tante taybin.... ) avec ou sans sucre, et on rigolait ensemble (La decontraction libanaise reste discutable...)
Le pauvre colonel de la caserne vient d'etre arrete, mais ces images m'ont donne de l'espoir qu'un jour on s'offrira a boire et on rira ensemble, plutot que de se tuer ....
je ne sais pas si je me fais de l'illusion, en me rappelant que ces memes soldats faisaient partis du convoi humanitaire qui a ete ensuite bombarde .....
C'est qd meme beau la paix!!!
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