Bises de nulle part
Il paraît que El Mansoura est le pays de Oum Koulthoum, de Adel Imam et de Faten Hamama. Il paraît aussi que c'est la 3e ville la plus importante d'Egypte, après Le Caire et Alexandrie (Alex pour les intimes). Avec près d'un million d'habitants, El Mansoura est la capitale de la Mohafazat (division administrative) de Daqahliya. Elle est située à 3 heures au nord-ouest du Caire, entre les deux bras du Nil qui vont se jeter dans la Méditerranée un peu plus loin, au niveau des ports de Rashid (Rosette) et de Dumyat (Damiette).
A El Mansoura, j'habite dans un bien curieux hôtel. Il porte le nom d'une grande chaîne internationale, dont il semble dépendre, mais il n'en a pas exactement les standards. Sur El Mansoura aujourd'hui, comme sur Le Caire hier, un petit vent doux fait régner une atmosphère paisible. Mais sitôt dans le lobby de mon hôtel, on peut oublier le bon vent, d'ailleurs inhabituel pour la saison : la climatisation "moderne" y fait régner une atmosphère glaciale qui frise bien les 15°C. Une dizaine de colonnes disparates et massives, tantôt cylindriques et tantôt parallélépipédiques, aux volumes et motifs à chaque fois différents, soutiennent un plafond particulièrement bas pour cette région du monde. Dans l'ensemble, la seule harmonie qui se dégage est celle des canapés couleur miel avec le sol beige. Assise là, dans un pull rouge, j'ai l'impression de faire tâche au milieu d'un océan couleur terre. Derrière un synthétiseur Yamaha, un musicien tente de faire régner une atmosphère plus chaleureuse dans le hall. Il est accompagné d'un saxo et/ou d'une flûte. Lorsque les musiciens sont las de contempler l'immense salle aux trois-quarts vides, ils abandonnent leurs instruments pour quelques minutes, laissant au seul synthé le soin de passer en boucle des morceaux à la Clayderman, La Passione et autres pseudo-romantismes contemporains. Je me concentre sur mon clavier en rêvant de calme.
Hier soir, j'ai été gagnée d'indulgence en voyant l'annonce du "grand opening soon" sur ma table : j'ai compris pourquoi les 5 derniers étages étaient encore en travaux, oubliant du même coup les grosses traces de sauce sur la nappe du restaurant et les gros doigts noirs sur les murs de ma chambre. Aujourd'hui, en apprenant que l'hôtel fonctionne depuis déjà plus de 2 ans, j'ai compris que les égyptiens et moi n'avons pas la même conception du mot "soon". L'hôtel comprend 9 étages, et dans l'ascenseur, les boutons vont de 1 à 9. Assez incongrument, ma chambre 317 est située au 4e étage. Mais comme le rez-de-chaussée ne se trouve pas au 1er étage pour autant, je ne manque jamais d'hésiter (et de rigoler) lorsqu'il s'agit appuyer sur le bouton. Je me demande comment feront les habitants de la chambre 917 pour accéder à l'étage inexistant. Je me demande si, un jour, El Mansoura sera plus célèbre pour ses chambres fantômes que pour la capture de Saint Louis en 1250, lors de la 7e croisade. J'aimerais avoir la clé de cette chambre 917, pour pouvoir dormir sous les étoiles et respirer, toute la nuit, l'air chargé des premières senteurs salines de la Méditerranée. De là-bas, je ne me lasserais pas d'admirer la petite forêt de palmiers qui longe le Nil à cet endroit, surplombant fièrement un immense parterre d'arbustes de tout genre.
A l'heure de la prière, j'aime entendre la clameur monter de la ville. Je tends l'oreille pour distinguer les différents muezzins, puis je me laisse envahir par la mélodie d'ensemble. Hayya ila as-salâââât (Allons à la prière)... Assise sur mon petit blacon, je souris doucement au soleil couchant.
Mon chauffeur du jour, hilare de me voir photographier le "tuk tuk" ci-dessous, m'apprendra que El Mansoura est également le pays d'Anis Mansour, dont j'ignorais le nom et sur lequel je ne trouverai que peu d'occurrences sur Google, en dépit de ses 177 écrits, ses 200 traductions et sa collaboration actuelle à Al-Ahram, quotidien égyptien fondé en 1875.
A El Mansoura, j'habite dans un bien curieux hôtel. Il porte le nom d'une grande chaîne internationale, dont il semble dépendre, mais il n'en a pas exactement les standards. Sur El Mansoura aujourd'hui, comme sur Le Caire hier, un petit vent doux fait régner une atmosphère paisible. Mais sitôt dans le lobby de mon hôtel, on peut oublier le bon vent, d'ailleurs inhabituel pour la saison : la climatisation "moderne" y fait régner une atmosphère glaciale qui frise bien les 15°C. Une dizaine de colonnes disparates et massives, tantôt cylindriques et tantôt parallélépipédiques, aux volumes et motifs à chaque fois différents, soutiennent un plafond particulièrement bas pour cette région du monde. Dans l'ensemble, la seule harmonie qui se dégage est celle des canapés couleur miel avec le sol beige. Assise là, dans un pull rouge, j'ai l'impression de faire tâche au milieu d'un océan couleur terre. Derrière un synthétiseur Yamaha, un musicien tente de faire régner une atmosphère plus chaleureuse dans le hall. Il est accompagné d'un saxo et/ou d'une flûte. Lorsque les musiciens sont las de contempler l'immense salle aux trois-quarts vides, ils abandonnent leurs instruments pour quelques minutes, laissant au seul synthé le soin de passer en boucle des morceaux à la Clayderman, La Passione et autres pseudo-romantismes contemporains. Je me concentre sur mon clavier en rêvant de calme.
Hier soir, j'ai été gagnée d'indulgence en voyant l'annonce du "grand opening soon" sur ma table : j'ai compris pourquoi les 5 derniers étages étaient encore en travaux, oubliant du même coup les grosses traces de sauce sur la nappe du restaurant et les gros doigts noirs sur les murs de ma chambre. Aujourd'hui, en apprenant que l'hôtel fonctionne depuis déjà plus de 2 ans, j'ai compris que les égyptiens et moi n'avons pas la même conception du mot "soon". L'hôtel comprend 9 étages, et dans l'ascenseur, les boutons vont de 1 à 9. Assez incongrument, ma chambre 317 est située au 4e étage. Mais comme le rez-de-chaussée ne se trouve pas au 1er étage pour autant, je ne manque jamais d'hésiter (et de rigoler) lorsqu'il s'agit appuyer sur le bouton. Je me demande comment feront les habitants de la chambre 917 pour accéder à l'étage inexistant. Je me demande si, un jour, El Mansoura sera plus célèbre pour ses chambres fantômes que pour la capture de Saint Louis en 1250, lors de la 7e croisade. J'aimerais avoir la clé de cette chambre 917, pour pouvoir dormir sous les étoiles et respirer, toute la nuit, l'air chargé des premières senteurs salines de la Méditerranée. De là-bas, je ne me lasserais pas d'admirer la petite forêt de palmiers qui longe le Nil à cet endroit, surplombant fièrement un immense parterre d'arbustes de tout genre.
A l'heure de la prière, j'aime entendre la clameur monter de la ville. Je tends l'oreille pour distinguer les différents muezzins, puis je me laisse envahir par la mélodie d'ensemble. Hayya ila as-salâââât (Allons à la prière)... Assise sur mon petit blacon, je souris doucement au soleil couchant.
Mon chauffeur du jour, hilare de me voir photographier le "tuk tuk" ci-dessous, m'apprendra que El Mansoura est également le pays d'Anis Mansour, dont j'ignorais le nom et sur lequel je ne trouverai que peu d'occurrences sur Google, en dépit de ses 177 écrits, ses 200 traductions et sa collaboration actuelle à Al-Ahram, quotidien égyptien fondé en 1875.
Pour El Mansoura, sur 564 pages, le Lonely Planet a réservé cette phrase lapidaire:
"For the tourist, there is absolutely nothing to see or do in El Mansoura".
Je rigole. Je remercie tout de même le wi-fi et mes écouteurs, qui vont me permettre, tous les soirs, de voyager vers des contrées moins reculées.
"For the tourist, there is absolutely nothing to see or do in El Mansoura".
Je rigole. Je remercie tout de même le wi-fi et mes écouteurs, qui vont me permettre, tous les soirs, de voyager vers des contrées moins reculées.
1 commentaire:
"Min Ennaya El Tnein" , da Post "Guamil" . CP
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