Hi, ezzayak...? Ca va pas!
Mes derniers posts, rédigés depuis Beyrouth, s'intitulaient Xmas, Adha & New Year's @ Beirut and a day @ Jbeil. Ils sont tous restés à l'état de brouillon, aussi inachevés que le printemps de mon pays.
Du Caire, ma vision des derniers "événements" se limite aux Actualités de Google, à quelques textos en provenance de Beyrouth et à la sollicitude de certains de mes interlocuteurs égyptiens. Ici, Beyrouth semble en faire rêver plus d'un. Et moi, pour quelques jours à Masr, Oum el Dounia (ie, Egypte, mère du monde), je ne ressens nul besoin de découvrir la ville tant elle me semble familière. En rentrant le soir, j'ai l'impression qu'il suffirait de rouler quelques minutes de plus pour arriver à la maison.
Depuis mardi pourtant, je lutte contre une angoisse sourde, comme une envie de pleurer mon pays, ses galets encore pétrolés et ses murs tantôt criblés de balles, tantôt flambants neufs. Voilà déjà un mois que je refuse de regarder le JT, d'écouter la radio ou de lire un journal, de quelque couleur qu'il soit. Pour mieux transcender (ou fuir ?) la réalité, j'ai également évité les bars, ces mêmes bars de Gemmayzé et de Hamra qui me servaient de refuge quelques mois plus tôt, et qui ont abrité pendant 10 jours de jeunes libanais venus du monde entier. Pour éviter d'entendre les mêmes polémiques sans les toucher du doigt, j'ai été me mêler aux campeurs du centre-ville. La première fois, je n'y ai vu qu'une immense fête populaire, des enfants qui jouent, de la musique sous les tentes et des posters des différents leaders. Il y avait aussi des vendeurs de narguilé et des marchands de ka3k (galette nationale au sésame), de ces ka3ks au fromage réchauffés au charbon que l'on ne trouve habituellement qu'à Tripoli. De jour, l'ambiance était bien moins festive. Sur la route que j'empruntai, un homme légèrement barbu et aux lunettes semi-teintées collectionnait les permis de conduire de tous les véhicules autorisés à pénétrer dans le périmètre du centre-ville. Il était assis sur une simple chaise de bois, devant une table tapissée de documents officiels de la République Libanaise, à deux pas d'un char de l'armée et des barbelés qui ceignaient le campement. Je me suis reproché de lui demander l'autorisation "d'entrer", mais, impressionnée par cet étrange check point, mes mots avaient devancé ma pensée. J'ai aussi remarqué que les barbelés étaient flambant neufs et qu'ils ne comportaient pas des pointes tridimensionnelles acérées à des intervalles réguliers : ils présentaient plutôt une apparence dentelée, comme autant de mini-rasoirs mis bout à bout ; ils m'ont semblé bien moins impressionnants que ceux de mon enfance.
A l'issue de trois semaines de séjour sur le sol libanais, j'avais pris l'avion avec une question que je me suis re-posée aujourd'hui. Je conçois que nous soyons pris au sein d'une tempête sionisto-irano-américano-syro-saoudo-franco-onusienne : mais quel étranger obligeait, mardi, l'un de mes concitoyens à en brutaliser un autre ? Et quelle cause nationale justifie donc la mort d'un libanais de plus ?
En déplacement au Caire, je me moque un peu de ce malaise qui me saisit par moments, en pensant à tous ceux qui ont vécu l'été 2006 à travers les images télévisées, les journaux, les textos, les conversations téléphoniques, les blogs et autres moyens de communication. Comme eux alors, je m'inquiète un peu pour mes amis. Comme eux, dans une ville trois fois plus peuplée que l'ensemble de mon pays, je me sens démunie.
Ce soir, pour le Liban, c'est 6 à 7 milliards d'euros collectés dans ma ville, et 6 à 7 morts dans mon autre ville. Ce soir, à Beyrouth, le couvre-feu est de vigueur. Et ce même soir, au Caire, je donnerais cher pour m'entendre dire, tout en sourire et en véritable Lebanese Mother Tongue : Hi, kifek, ça va ?
5 commentaires:
Que dire Nad... que dire de plus?
Il etait temps que tu t'y remettes ma chere! On aurait aime lire ton blog dans des circonstances plus joyeuses.
Il ne nous reste plus qu'a esperer que ca ne degenere pas.....
Tu ma manquée nadine, et bien heureux de te relire...
Quant a ce qui se passe a Beyrouth et au Liban en général...rien a dire a part les autres quinzes années qu'il faudra pour oublier ...et puis, une fois fait,il y aura toujours des imbéciles pour recommencer.
j'ai 40 ans, a l'intervale d'un round chaque 15 ans...il ne m'en reste plus que deux. Aprés quoi, qu'ils aillent tous en enfer. A moins qu'ils ne le soient deja, dans ce cher Liban.
jpz
Les concertinas : barbelés razoir sont des rouleaux constitués de spirales solidement clipsées entre elles et formant un obstacle dense de lames razoir. Bien bien plus mechantes que les barbeles a 3 pointes de notre enfance
nad ca fait plaisir de te lire et de voir qu'on est plusieurs a avoir mal au ventre et ne pas comprendre ce qui pousserait un libanais a tuer son voisin en janvier 2007... j'ai l'impression qu'une guerre (surtout civile) est de la responsabilité de tous, donc aussi de la mienne mais je ne sais pas quoi faire pour arreter ce train de l'auto destruction collective...
bises de paris, hala
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